Les récentes consultations menées par Emmanuel Macron pour la nomination d’un nouveau Premier ministre exposent un dangereux détournement de la Constitution. En ignorant délibérément le choix des urnes, Macron se livre à une manipulation éhontée des principes constitutionnels, transformant ce qui devrait être un texte au service du peuple en un instrument de domination au service de son pouvoir. L’analyse des actions du président, à travers la pensée d’Emmanuel-Joseph Sieyès, auteur du pamphlet révolutionnaire Qu’est-ce que le Tiers-État ?, révèle l’étendue de cette dérive inquiétante.
La Constitution manipulée par et pour le pouvoir
L’article 5 de la Constitution, qui confère au président le pouvoir de nommer le Premier ministre, est devenu sous Macron un outil de perversion politique. Sous le prétexte fallacieux de « stabilité institutionnelle », ce pouvoir est utilisé pour écarter la volonté populaire, clairement exprimée lors des élections législatives. Le Nouveau Front Populaire (NFP), qui a remporté une majorité relative, aurait dû, en toute logique démocratique, se voir confier la formation du gouvernement. Pourtant, Macron préfère tordre la Constitution à sa convenance pour maintenir son emprise sur le pouvoir, ignorant ainsi le principe fondamental de souveraineté populaire.
Ce détournement rappelle les mises en garde de Sieyès, qui voyait dans la Constitution non pas un carcan destiné à étouffer la nation, mais un outil devant servir ses intérêts :
« Non seulement la nation n’est pas soumise à une constitution, mais elle ne peut pas l’être, mais elle ne doit pas l’être, ce qui équivaut encore à dire qu’elle ne l’est pas. »
Il est crucial de bien distinguer la République de la démocratie. La République repose sur ses institutions, ses valeurs, son éthique, sa Constitution, sa légalité. Elle est le cadre institutionnel dans lequel se déploie l’exercice du pouvoir. Mais la démocratie, elle, repose sur ses libertés, ses manifestations, sa légitimité. C’est l’expression vivante et dynamique de la volonté populaire. Lorsque Macron se cache derrière une interprétation étroite de la « stabilité institutionnelle », il confond délibérément ces deux notions pour mieux asseoir son pouvoir. Il instrumentalise la République et ses outils pour étouffer la démocratie, privant ainsi le peuple de ses libertés et de sa légitimité.
Macron, en manipulant cyniquement les concepts constitutionnels, se livre à une interprétation opportuniste de la loi fondamentale de notre République. Plutôt que de garantir le fonctionnement régulier des institutions et le respect de la volonté populaire, il utilise la Constitution comme un bouclier pour protéger son pouvoir, au mépris des articles 2 et 3 :
« Son principe est : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum. Aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s’en attribuer l’exercice. »
En se substituant à la volonté du peuple, Macron vide la Constitution de son essence démocratique. Ce texte, qui devrait être le garant de l’expression de la volonté nationale, devient sous sa présidence un mécanisme de contrôle destiné à étouffer toute contestation et à verrouiller le pouvoir en place.
Une démocratie confisquée, un peuple trahi
La stratégie de Macron pour contourner les résultats des élections et imposer un gouvernement à sa convenance constitue une véritable confiscation de la souveraineté populaire. En s’appuyant sur des interprétations biaisées et calculées de la Constitution, il trahit les principes fondamentaux de notre République. Ce faisant, il n’érode pas seulement la confiance du peuple dans ses institutions ; il met en péril la démocratie elle-même.
Sieyès avait déjà prévenu des dangers d’un tel détournement :
« De quelque manière qu’une nation veuille, il suffit qu’elle veuille ; toutes les formes sont bonnes, et sa volonté est toujours la loi suprême. »
Il est crucial de se rappeler que la souveraineté appartient au peuple, et que toute tentative de la confisquer, même sous couvert de « stabilité », est une atteinte grave à la démocratie. Si nous persistons sur cette voie, où les résultats électoraux sont manipulés et les principes démocratiques dénaturés, notre République risque de devenir une simple façade, vidée de son contenu et de sa raison d’être.
Il est donc impératif de souligner que derrière cette manipulation constitutionnelle se cache la défense d’intérêts particuliers. Emmanuel Macron, en écartant le choix du peuple, ne protège pas la démocratie, mais une « stabilité » qui sert surtout à maintenir son propre pouvoir et celui de ceux qui l’entourent. Cette « élite » que dénonçait déjà l’abbé Sieyès en 1789 reste aujourd’hui, comme alors, étrangère aux intérêts de la nation :
« Une classe entière de citoyens mettrait sa gloire à rester immobile au milieu du mouvement général […]. Une telle classe est assurément étrangère à la nation […]. Elle est étrangère à la nation […] par son objet, puisqu’il consiste à défendre non l’intérêt général, mais l’intérêt particulier. »
Il est temps pour Macron de reconnaître que la légitimité de son pouvoir dépend de sa fidélité à la volonté populaire, et non de sa capacité à contourner les résultats électoraux pour servir des intérêts particuliers. La démocratie française mérite mieux que cela ; elle mérite d’être défendue avec courage et intégrité.
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