49.3 : Paris à feu, bientôt à sang ?

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Ce samedi 18 mars, une manifestation nocturne contre la réforme des retraites a eu lieu. C’est le troisième jour de révolte depuis l’utilisation du 49.3 par le gouvernement jeudi dernier. Nos reporters étaient présents.


INQUIÉTUDES DE LA PRÉFECTURE DE POLICE

Suite à l’utilisation du 49.3, des manifestations spontanées ont lieu jeudi et vendredi en fin d’après-midi et dans la soirée. L’intersyndicale appelle à des rassemblements locaux le week-end dans toute la France.

En plus de couper court à tout débat parlementaire, le gouvernement s’oppose à tout rassemblement citoyen. À Paris comme à Moscou, les oligarques ne s’encombrent pas de démocratie. La préfecture de police a donc interdit les rassemblements sur les Champs Élysées et sur la place de la Concorde. Cet endroit symbolique, face à l’Assemblée Nationale et proche de l’Élysée, de Matignon, et du Sénat, est surveillé par de nombreuses équipes de police dès le matin. 

Des dégâts des manifestations précédentes sont encores visibles sur la place de la Concorde le 18 mars 2023. Crédits photo : Tanguy Lacroix / Gavroche
Des dégâts des manifestations précédentes sont encores visibles sur la place de la Concorde le 18 mars 2023. Crédits photo : Tanguy Lacroix / Gavroche

En début d’après-midi, plusieurs jeunes sont arrêtés à différents endroits de la place de la Concorde, et sont embarqués suite à des fouilles au corps en tentant d’entrer sur la place.

COLÈRE POPULAIRE

Manifester près de l’Assemblée Nationale étant devenu impossible, le rassemblement commence sur la place d’Italie à 18 heures. Parmi la foule, certains élus sont présents, comme la députée Sandrine Rousseau. La manifestation démarre vers 18h30, et longe l’avenue de Choisy, au milieu des nombreux commerces chinois et des tours d’habitation du 13e arrondissement. Le slogan qui est le plus scandé par la foule dit : « Louis XVI, Louis XVI, on l’a décapité ! Macron, Macron, on veut recommencer ! » 

La banalisation des tags et slogans faisant l'apologie de la violence est symptomatique d'une défiance envers un gouvernement qui ne souhaite pas négocier. Crédits photo : Tanguy Lacroix /Gavroche
La banalisation des tags et slogans faisant l’apologie de la violence est symptomatique d’une défiance envers un gouvernement qui ne souhaite pas négocier. Crédits photo : Tanguy Lacroix /Gavroche

Romain est responsable de la CGT Cheminots de la rive gauche de Paris. Selon lui, « le 49.3, c’est un aveu de faiblesse supplémentaire ». Il considère que le 49.3 n’est « pas une surprise », et l’encourage à poursuivre les grèves reconductibles. « Les mobilisations populaires ont permis d’arriver à ce niveau-là où il y a des députés qui se sont faits dessus. Ils sont poussés par leurs électeurs dans les circonscriptions. » Le projet de réforme des retraites est difficile à soutenir pour ces élus locaux, car il est contesté par 93% des actifs, selon une étude de l’Institut Montaigne.

« Le 49.3 montre la dégueulasserie de ce gouvernement. »

Fanny porte un gilet jaune floqué du logo de l’association Droit au Logement. « Le 49.3 montre la dégueulasserie de ce gouvernement. Et [la réforme des retraites] n’est pas la seule loi scélérate depuis que Macron est au pouvoir. Je ne serai pas étonnée que pour d’autres lois, ils se permettent de l’utiliser encore. » C’est la douzième fois que le 49.3 est utilisé depuis 2017.

VIOLENCES

Arrivés à la Porte de Choisy, les premiers feux de joie s’allument. Des manifestants brûlent des poubelles débordant de déchets, les tas de déchets étant omniprésents dans la capitale depuis le début de la grève des éboueurs.

Feu de poubelles près de la porte de Choisy, le samedi 18 mars 2023. Crédits photo : Poppy / Gavroche
Feu de poubelles près de la porte de Choisy, le samedi 18 mars 2023. Crédits photo : Poppy / Gavroche

La police interpelle 122 individus au cours de la soirée. L’une des interpellations est particulièrement violente : un homme est immobilisé et transporté par quatre policiers, tandis qu’un cinquième lui met plusieurs coups de matraque. La foule siffle et hue les forces de l’ordre.

« C’est une violence gratuite ! »

Durant toute la soirée, de nombreuses charges ont lieu. Le gaz lacrymogène est utilisé à plusieurs reprises. « L’usage du gaz est ridicule, c’est une violence gratuite ! » nous dit Salim, juste avant d’être coupé par une nouvelle projection de gaz lacrymogène.

Gendarmes mobilisés lors de la manifestation nocturne du 18 mars 2023 à Paris. Crédits photo : Tanguy Lacroix / Gavroche
Gendarmes mobilisés lors de la manifestation nocturne du 18 mars 2023 à Paris. Crédits photo : Tanguy Lacroix / Gavroche

Salim est un gilet jaune originaire du Puy-en-Velay (Haute-Loire). Cet ancien boulanger n’avait jamais manifesté de sa vie avant novembre 2018. « Moi, ça fait 5 ans que je suis là, j’ai été gazé, j’ai un trou dans le tibia, j’ai été en garde à vue deux jours mais je suis toujours là. J’ai mes collègues, ils ont des mains arrachées et des yeux éborgnés, mais ils sont toujours là. On ne lâchera pas l’affaire, on n’a rien à perdre. […] Les gilets jaunes, c’est une graine qui a germé entre les pavés, et dont il sera difficile de se débarasser. » 


La motion de censure, seul moyen de contrer un 49.3, sera étudiée à l’Assemblée Nationale ce lundi 20 mars à 16 heures. Si la motion de censure est validée par l’Assemblée Nationale, la réforme sera bloquée et le gouvernement destitué. Si elle ne passe pas, la réforme des retraites sera imposée. L’enjeu est donc de taille, et tout se jouera dans les prochaines 24 heures. De nouvelles mobilisations sont à prévoir partout en France d’ici là. 

 

T. L. et Poppy

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